top of page

Comment remporter les défis de l'économie circulaire dans le secteur de la Construction ?


Building

​(5 minutes de lecture)


Dans le contexte actuel où la pression réglementaire et sociétale en faveur de la protection de l’environnement devient de plus en plus forte et où l’épuisement des ressources naturelles s’accélère, la transition vers le modèle de l’économie circulaire s’impose de plus en plus largement. L’objectif de ce modèle de limiter l’extraction, la consommation et le gaspillage des ressources naturelles et ainsi l’impact sur l’environnement.


Nous proposons notre éclairage sur trois questions clé :

  • pourquoi ce modèle est-il particulièrement pertinent pour le secteur de la construction ?

  • quels leviers actionner pour faciliter le passage à l’économie circulaire ?

  • quels sont les défis qui se posent aux acteurs du secteur pour opérer la transition tout en préservant leur performance économique ? 



1. Pourquoi l’économie circulaire est-elle un modèle particulièrement pertinent pour le secteur de la construction ? 


La transition vers l’économie circulaire s’impose dans quasiment tous les secteurs de l’économie, et celui de la construction doit en être un des principaux vecteurs tant il est concerné par les enjeux environnementaux et l’épuisement des ressources :


  • la construction est le 2ème secteur le plus émetteur de gaz à effet de serre en France avec 23 % des émissions. Elle est donc au cœur de la stratégie nationale bas carbone (SNBC) de la France qui vise à 2030 une réduction de 45% des GES (par rapport à 2020) puis la neutralité carbone d’ici à 2050 ;

  • le secteur est aussi le plus gros émetteur de déchets en volume ;

  • l’accélération de l’épuisement des ressources naturelles, dont la construction est un très gros consommateur (du sable de rivière utilisé dans les bétons et les mortiers par exemple) menace à moyen terme la capacité du secteur à produire ;

  • l’émergence de filières de recyclage / réutilisation / réemploi dans ce secteur a montré la faisabilité et l’intérêt de développer ce modèle (ex. plâtre, verre, …) ;

  • les investisseurs sont de plus en plus exigeants en matière d’engagement sociétal et environnemental vis-à-vis de leurs participations et intègrent des critères non financiers en lien avec la taxonomie et la CSRD dans leurs choix d’investissement ;

  • le cadre réglementaire est plus contraignant, qu’il s’agisse de la mise en place de filières REP (Responsabilités Elargies des Producteurs) et des objectifs de réduction, de recyclage, de réintégration matière et de réemploi associés ; ou encore de l’augmentation de la TGAP qui a doublé entre 2020 et 2025 en ce qui concerne l’incinération et augmenté de 61 % pour l’enfouissement.


2. Quels leviers actionner pour faciliter le passage à l’économie circulaire ?

Pour l’entreprise, l’enjeu du passage à l’économie circulaire est d’installer la notion de préservation des ressources naturelles au cœur de son activité, sur l’ensemble de la chaîne de valeur. Pour cela, elle dispose d’un ensemble de leviers, comme le montre le schéma ci-dessous.




Certains leviers sont particulièrement adaptés au secteur de la construction et devraient être activés en priorité :


  • l’éco-conception : concevoir des ouvrages plus économes en matières premières naturelles, plus faciles à entretenir, à rénover et à déconstruire est un point de départ essentiel. Sans cela, il sera plus difficile de maximiser la durée de vie des ouvrages (la rénovation plutôt que la démolition / reconstruction) et de valoriser les matériaux et composants qui y sont incorporés (en recyclage ou en réemploi). Dans le secteur de la construction, il existe aujourd’hui, grâce aux nouvelles technologies (BIM), la possibilité de considérer les bâtiments comme des "banques de matériaux" ou des sources de matériaux précieux pouvant être récupérés et réutilisés. Dès le premier jour de la conception, toutes les options de réutilisation et de recyclage des matériaux de construction peuvent être envisagées et intégrées ainsi que la possibilité de démonter le bâtiment à la fin de son cycle de vie. Tous les composants doivent pouvoir être séparés les uns des autres afin de pouvoir être démontés et réutilisés de manière économique ;

  • l’approvisionnement durable qui vise à limiter l’utilisation de matières premières vierges au profit de matières recyclées issues de l’économie circulaire dans un secteur qui devra faire face à l’avenir à des pénuries de certaines filières (sable, granulats...) et encourager l’approvisionnement de proximité. Par exemple, des grands groupes tels que Vinci Construction investissent fortement dans le développement de solutions innovantes visant à substituer le plus possible de granulats naturels par des granulats de qualité à base de recyclés via la mise en place d’un grand nombre de plateformes d’accueil et de revalorisation des déchets minéraux du BTP à proximité des chantiers ;

  • la collecte, le tri et le recyclage par le biais de filières organisées, qui doivent être massifiées pour être économiquement pertinentes et répondre à un large champ de contraintes (normes de construction ; standards de qualité technique et environnemental ; attentes des clients et des donneurs d’ordres). Dans un contexte inflationniste (sur les matières premières comme sur le coût de l’énergie), la réintégration dans les process de production de déchets et de matières recyclées pourra constituer un avantage économique, voire un différenciateur vis-à-vis de la concurrence. Saint Gobain, au travers des dispositifs Isover Recycling et Placo Recycling, a mis en place des filières de récupération et préparation de déchets de laine de verre et de placo à proximité de ses usines afin de les réintégrer dans son processus et de réaliser des économies d’énergie ;

  • enfin, le réemploi, déjà fortement développé sur le gros œuvre et les inertes mais encore au stade embryonnaire sur le 2nd œuvre et qui pourrait jouer un rôle plus important à l’échelle d’un territoire.

  

3. Quels sont les défis qui se posent aux acteurs du secteur pour opérer la transition tout en préservant leur performance économique ?

 

Le défi majeur est de parvenir à rendre désirables, en termes d’image, de performance technique et environnementale et de coût, les produits, matériaux et ouvrages issus de l’économie circulaire pour l’ensemble des acteurs de la chaîne de valeur : du fabricant au donneur d’ordre final, en passant par les intermédiaires (artisans, prescripteurs, …).


Pour y parvenir, l’un des principaux enjeux sera de les rendre économiquement accessibles, c’est-à-dire à un coût similaire ou inférieur à leurs équivalents issus de l’économie « linéaire ». Au-delà de penser très en amont l’éco-conception, il s’agira notamment de maîtriser les coûts de collecte, de tri, de recyclage et de réemploi. La création de la REP et la mise en place de plusieurs Eco-Organismes sur la filière PMCB devraient, entre autres, contribuer à doper le développement des filières de collecte, tri et recyclage. Ces dispositifs favorisant la massification des flux de déchets triés et valorisables sur les chantiers et à proximité permettront d’investir dans des unités industrielles de valorisation pérennes et rentables. Deux autres leviers contribuent également à l’accessibilité économique :

  • la création de collaborations entre les acteurs d’une même filière, afin de définir les standards et normes communs, d’harmoniser les pratiques, de créer des boucles locales performantes et éventuellement de mutualiser les investissements en R&D. Saint Gobain et Sequens ont ainsi fédéré quatre entreprises pour recycler en boucle fermée  l’ensemble des vitrages d’une résidence ;

  • le développement d’un modèle de réemploi directement sur les chantiers ou sur d’autres sites. La proximité géographique des différents acteurs étant clé pour l’efficience du modèle, l’essor de plateformes locales mettant en relation offreurs et acheteurs de matériaux peut représenter une solution. Telle est l’ambition de Cyneo, la nouvelle filiale créée par Bouygues Construction consacrée au réemploi des matériaux de construction, qui se veut être une solution globale et locale d’accompagnement complet au réemploi.


Deux outils contribuent à la viabilité économique de ce modèle :

  • la traçabilité des matériaux et des produits, depuis leur installation initiale (grâce au BIM) et tout au long de leurs cycles de vie successifs. La traçabilité aide à répondre à l’enjeu de qualité et de normes et facilite le pilotage de la performance financière ;

  • la sensibilisation des donneurs d’ordre publics et privés et tous les acteurs de la chaîne de valeur (prescripteurs, architectes, bureaux d’études, constructeurs, artisans ou opérateurs) à la notion d’économie circulaire pour augmenter la demande.


En conclusion

 

La transition à l’économie circulaire est devenue un impératif pour l’ensemble des acteurs du secteur de la construction. Cette mutation implique de penser sa stratégie au-delà des bornes de son écosystème, de mobiliser tous les acteurs quel que soit leur rôle dans la chaîne de valeur et de sensibiliser les donneurs d’ordre et les clients finaux.

Chez Kéa, nous sommes convaincus qu’il est temps d’entrer dans cette nouvelle ère de collaboration et de la mettre en œuvre à l’échelle d’un secteur et des territoires.


À lire également :


Auteurs :



Sandra Bertholom

Partner Groupe, Kéa



Olivier Mouton

Partner Groupe, Kéa



Romain Launay

Directeur, Kéa


Thomas de La Presle

Directeur, Kéa





Comments


bottom of page